En ouvrant les yeux c’était tout autre , des gens assis sur des sièges légèrement -et c’est un euphémisme- sale , avec des lumières sur le haut du wagon qui avaient tendances à sautées quelquefois au passage de certaines lignes. Les gens étaient avec des écouteurs , ou les yeux rivés sur leurs journaux , Libération , Le Parisien , 20minutes , on y lisait en grand titre « Le gouvernement Valls II » , « La France ; un avenir ? » , ne levant pas une seconde les yeux pour regarder autour d’eux. En même temps il est vrai que le paysage comparé à celui où j’ai été enlevé n’a rien de plaisant , il faut noir , les tunnels s’engouffrent les uns après les autres , comme un abîme qui se fait avaler par un abime encore plus grand que l’autre, des lumières jaunâtres passent en défilés devant les yeux ébahis des spectateurs encore somnolant .
L’air est chaud , irrespirable , si caractéristique des métros parisiens. J’étais là assis sur un siège où personne ne me bouscule -une chance que les provinciaux ne peuvent décemment pas comprendre- , à calculer le nombre d’arrêt que le métro devait encore faire avant que je ne descende , c’est une manière comme une autre me diriez-vous pour se réveiller le matin , je ne suis malheureusement pas très journal au petit matin , et encore petit matin c’est peu de le dire ! Il était 06 H 43 , j’entendais encore les échos de ma nuit de sommeil se moquant de moi tout en s’enfuyant à travers mon esprit encore très peu limpide . Les écouteurs diffusant un son pour faire passer ce réveil difficile.
Le métro s’arrête , arrêt « Art & Metier » , et c’est là que nous allons parler ensemble de la magie de Paris, car il y a bien une magie , mais une magie que certains ne voient pas comme il faudrait la caractérisée. Paris est une sorte de « hasard » un hasard chanceux , malchanceux , qui divague entre les idées de ceux qui y croient et ceux qui disent que c’est dieu qui se planque incognito. Mais le hasard à Paris , plus qu’ailleurs est étonnant , on trouve , croise , voit et entend de tout pour qui sait tendre l’oreille ou ouvrir les yeux. Et c’est ce qu’il est arrivé ce matin là.
Un enfant rentre , en trois quart grisâtre fait de laine , avec un pantalon noir et des chaussures de ville noires , une coupe bien homogène parfaitement tenu , il est brun , haut comme trois pouces et avec le visage doux que les enfants de son âge peuvent bien avoir , huit , dix ans peut être mais pas plus. Il tenait la main , ferme , imposante et pourtant délicate de son père , qui lui , était habillé d’un costume bleu marin foncé , avec une cravate rouge sanguin , chemise blanche , bouton manchette de chaque côté argentés , le col de sa chemise était un col italien , long , fin et l’amenant jusqu’au rebord de son costard, il était rasé de près , les cheveux légèrement en fouillis , mais un fouillis ordonnés , prévus , élégant . Des chaussures de daim marron foncé avec des lacets bleu foncé. Ces lacets m’ont interpelé , il était à aller jusqu’à accorder ses lacets , et vous savez quand on a un pareille soucis du détail , c’est qu’on est quelqu’un qui analyse et comprend très bien la réalité dans laquelle l’on se situe.
Vu l’horaire matinale , le fils et son père n’ont eu aucun soucis à se trouver une place. Imaginez-vous maintenant , Avenue Montaigne , ses hotels , ses restaurants , son cadre prestigieux , beau , soigné , élégant , ses rues pavés et propre , ses commerçants souriant et eux-même très présentables , les voituriers attendant patiemment qu’un client vienne conquérir une des chambres de leurs palaces , une reine à leurs mains , et un carrosse comme locomotion. Et puis vous , vous êtes là, le SDF avec votre cadis , votre paire de chaussure trouée , et votre odeur de pigeon mort dans les bas fonds de cette ville.. Vous voyez le malaise ?
« Oui mais il ne faut pas se déshabiller sinon tu risques d’avoir froid. »
« Et c’est grave ? »
« Tu as envie d’être malade dis-moi ? »
« Bien sûr que non papa où est l’intérêt de tombé malade de manière idiote ? »
« Mais non , personne n’est triste, ils sont juste fatigué, se lever tôt n’est pas appréciable tu sais ? »
« Fatigué d’être triste ? »
« Mais non mais non , simplement ce matin tu ne voulais pas sortir de ton lit pour aller à l’école , sache que tu n’es pas le seul , des tas de personnes ont fait comme toi , mais par obligation ils se sont lever. »
« Mais on s’est levé tôt tu sais.. »
« Qui voulait prendre le métro , qui était à me sourire jusqu’à s’en bloquer la mâchoire hier soir pour le prendre ce matin ? »
« Moi papa , moi . »
« Parce qu’ils n’ont pas de raison de sourire. »
« Et alors il faut nécessairement une raison pour sourire ? »
« Pourquoi ? C’est pourtant simple. »
« C’est quand c’est simple que c’est compliqué. »
« Les gens sont triste au final comme dans ce métro. »
« Ne vaut-il pas mieux être idiot que triste ? »
« Mais ce n’est pas toi qui me dis toujours que le plus grand respect pour les autres que l’on peut leur faire c’est d’être soi-même ? »
« Comme toi et maman ? »
« Haha c’est un peu ça »
« Ils se font des bisous aussi ? »
« Certains oui parce qu’ils s’aiment d’amour , mais d’autre non , mais ça ne les empêches pas d’apprécier les moments passés ensemble. »
Mes yeux me piquaient , le hasard , la magie de Paris m’avait atteint pour aujourd’hui , je me levais pour descendre au prochain arrêt , à droite comme à gauche certains cachaient leurs réactions , mais tous , ce matin , avions tirer une leçon de la conversation de deux êtres d’exceptions.
J’ouvrai la porte , les regardant une dernière fois je descend , et j’entend le père dire :
J’étais à deux doigts de craqué, de m’effondrer moi, les gens qui me dise que je suis fort , et que je survis à tout , moi j’allais m’effondrer devant un arrêt de métro , pour une conversation entre un père et son fils. Moi, parce que , simplement , j’ai fais le choix de vivre toutes mes émotions à mon maximum.. Moi dès six heures du matin , j’étais déjà prêt à exploser de passion.. J’ai mis ma main devant la bouche.. Ma gorge se serrait , le métro venait de partir , le bambin et son papa disparaissait au loin dans le trou noir du tunnel , j’étais crispé. Mes yeux me brûlaient désormais.. J’allais tombé , je le sentais , mes jambes tremblantes de mes sentiments qui parcouraient tout mon corps. Il fallait que j’arrête ça , que j’arrête ce virus de se répandre. J’allais m’échouer encore une fois.. J’ai ravaler ma salive , et avec elle le poids de mes sentiments. Parce que la vérité c’est que moi aussi j’ai peur. Affreusement peur. Horriblement peur de ce que mes sentiments font de moi.
Désamorçant la bombe sentimentale que j’étais , je m’engouffrais dans les escaliers à l’assaut d’une journée qui déjà , venait de m’amocher.

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