jeudi 2 août 2018

Chapitre 697 - Bonne nuit








Il s'asseya sur le bord du tronc d'arbre, le plus éloigné du feu qui crépitait, à la fois visible par son visage et le haut de son corps tandis que le reste plongé dans l'obscurité de la douce nuit d'été qui nous accompagnait laisser deviner des ombres par les petits éclatements du feu qui laissait entrevoir le contour de ses épaules.

Il se gratta le crâne de sa main comme d'un air chercheur, de ceux qui creusent les idées, un soupir laissant s'échapper de sa bouche en plein milieu de cette forêt nocturne, il avança une de ses jambes près de la lumière du feu de camp, appuyant sa main sur son genou tandis que l'autre main avait, elle, déjà repris la canne qui l'avait amené jusqu'ici s'appuyant désormais aussi sur celle-ci. Il plongea son regard paternel en direction du petit feu qui dorénavant ronronnait.


"Tu sais petit, tes souvenirs se détériorions avec le temps, ils partiront sans que tu ne les ai remarqués, d'autres à l'inverse resurgiront bien des années plus tard pour une sensation, une odeur que tu croyais avoir oublié. Les meilleurs comme les plus mauvais, seront traités de manière égale. Le plus radieux des souvenirs ne brillera plus, le plus sombre ne t'empêchera plus de voir la lumière du lendemain. Ce sont de petites choses, des détails qui font toute la saveur de tes journées quelquefois. Ils partiront de la même façon qu'ils ont pu avoir pour s'installer dans ton quotidien, avec fracas ou douceur. Certains claqueront fort la porte, d'autres ne donneront même pas l'impression de l'avoir ne serait-ce qu'entre-ouverte. Il faut savoir prendre soin de ces instants, ces moments qui ont pour t'apporter de la joie ou te donner des leçons que tu ne souhaites pas encore apprendre aujourd'hui. C'est eux qui te permettront de tenir le choc dans les moments difficiles, de te rappeler ton chemin parcouru, la saveur de tes buts, de tes idéaux. Ils te remémorons la raison pour laquelle tu as entrepris ce voyage, ce que tu y as gagné et ce que tu as laissé pour parvenir à gravir les pentes rugueuses. Ils te rappelleront ce que tu as fais, et ce que tu n'as pas pu faire. Dans les moments d'incertitudes qui combleront ta vie, ils seront présents pour te rappeler qui tu aspires à être quand, la tête dans le brouillard et remplis de peur tu oublieras. Ils te rappelleront la force avec laquelle tu as des convictions et les rêves que tu y accroches."

Il marque alors une longue pause, suffisamment pour lui prendre le temps de se relever d'un air assagi, la détermination avec laquelle ses mots avaient pu apparaître laisse place à la douceur d'un vieil homme reconnaissant envers la vie. Se levant du tronc d'arbre alors couché sur le côté du feu, avançant dans ma direction il pose alors sa main sur mon épaule en faisant face à la route qui timide reste dans l'ombre du feu;

"C'est pour ça, c'est pour tout ça que tu dois y faire attention, tu ne pourras pas tous les entretenir et les garder intacts, seul quelques-uns auront cette chance et ça ne sera pas toi non plus qui décidera lesquels tu garderas de ceux que tu oublieras. Cherche y un sens et entretiens la sensation et le message qu'ils gardent en eux, parce que c'est une partie de toi qui a existé et qui résonne en toi même si dorénavant elle n'a plus sa place, elle te rappelle qui tu as été à un instant de ta vie. A l'image de ce feu que tu vas éteindre, l'important ne réside pas dans le fait qu'il brûle, mais qu'il a brûlé, il a existé. Il ne s'agit pas de vivre, il s'agit d'exister dans tout ce qu'il est possible que tu ressentes. Prend soin de tes souvenirs, viendra un jour où seul eux te rappelleront qui tu es et pourquoi tu fais tout ça. Rentrons maintenant."

Le feu n'avait pas eu besoin de moi pour s'éteindre, il fit son dernier ronronnement avant de s'endormir dans les draps de la nuit et de se résoudre à laisser la nuit être. 



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